Stop au commerce avec les colonies israéliennes illégales en Palestine

Le rapport d’Oxfam International du 15 septembre 2025 démontre que les activités commerciales et financières d’États et d’entreprises étrangères soutiennent directement et en toute illégalité la prolifération des colonies israéliennes en Cisjordanie. Ce qui engendre des conséquences dévastatrices sur la vie des Palestiniens, violant leurs droits fondamentaux, détruisant leur économie et perpétuant une occupation illégale d’une rare cruauté.

La Cour internationale de justice (CIJ) a réaffirmé en 2024 l’illégalité de la construction des colonies israéliennes

Dans son avis très détaillé du 19 juillet 2024, la CIJ a de plus rappelé aux États tiers l’obligation juridique de cesser tout soutien économique aux colonies.

Depuis la guerre des Six Jours en 1967, Israël occupe la Cisjordanie, Jérusalem-Est, Gaza et le plateau du Golan syrien. L’ensemble de la communauté internationale considère les colonies israéliennes comme une violation flagrante du droit international.

Malgré cela, plus de 700 000 colons israéliens vivent aujourd’hui dans plus de 200 colonies en Cisjordanie, contrôlant 42 % des terres (2 000 km²) et la majorité des ressources en eau. Chaque année, Israël consacre plus de 1,2 milliard de dollars au développement des colonies. Cette expansion se fait par la construction d’infrastructures dédiées aux seuls colons (routes, réseaux d’eau, électricité, éducation) qui contournent et isolent les communautés palestiniennes. Les points de contrôle militaires et les barrages routiers ont pour effet de morceler la Cisjordanie, rendant la circulation des personnes et des marchandises extrêmement difficile, voire impossible. Cette situation a un impact direct sur l’économie palestinienne, qui est étouffée. Le bureau des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) a recensé depuis octobre 2023 l’implantation illégale de nombreuses nouvelles colonies (rien qu’en 2023, 30 682 nouveaux logements ont été approuvés en Cisjordanie, +180 % en cinq ans), la mise en place de plus de 200 nouveaux checkpoints créant des obstacles à la circulation, portant ces checkpoints à environ 800.

Un système d’apartheid et des violences extrêmes

Les Palestinien·nes subissent un système juridique discriminatoire : les colons israéliens jouissent des droits civils israéliens, tandis que les Palestinien·nes sont soumis à des tribunaux militaires, avec un taux de condamnation proche de 100 %. Le ministre de la Sécurité Nationale Itamar Ben-Gvir, qui s’est à maintes reprises illustré par ces propos génocidaires, a augmenté les permis d’armes sophistiquées qui sont maintenant accordés à 60000 colons. En conséquence, les violences des colons (destruction de récoltes, attaques physiques, harcèlement, assssinats) ont redoublé et sont perpétrées en toute impunité, avec la complicité des forces israéliennes. Rien qu’en 2024, 744 attaques contre des terres agricoles et des récoltes ont été recensées. Depuis le 7 octobre 2023, l’OCHA documente des dizaines d’attaques hebdomadaires, souvent armées. Il indique que 900 Palestiniens ont été tués et plusieurs milliers blessés en Cisjordanie. Il a recensé plus de 3060 bâtiments détruits et 6136 personnes déplacées, dont 1500 enfants en Cisjordanie.

Des milliers de Palestiniens ont été arrêtés, dont des enfants, et sont détenus dans des conditions inhumaines ; au moins 75 personnes sont mortes en détention entre octobre 2023 et août 2025.

Le commerce illégal a des conséquences dévastatrices sur la vie des Palestiniens

L’Oxfam montre que les activités commerciales et financières d’États et d’entreprises étrangères ont des conséquences dramatiques pour les Palestiniens.

La première est la dépossession des terres et la destruction des ressources. Plus de 2 000 km² de terres palestiniennes ont été confisqués depuis 1967, dont des terres agricoles vitales. La culture de l’olivier, qui représente 14 % de l’économie palestinienne, est particulièrement ciblée : plus de 800 000 oliviers ont été déracinés depuis 1967, et 10 000 supplémentaires en 2023.

La deuxième est l’accaparement des ressources en eau : Israël contrôle 80 % des ressources en eau de Cisjordanie. Les colons consomment en moyenne 247 litres d’eau par jour, contre 82,4 litres pour les Palestinien·nes (en dessous du minimum recommandé par l’OMS).

La troisième est la création d’une crise humanitaire et économique. L’Oxfam montre que l’économie palestinienne souffre d’une perte annuelle de plusieurs milliards de dollars. En Cisjordanie, le taux de chômage atteint 35 % et a plus que doublé depuis octobre 2023. Le taux de pauvreté atteint un niveau alarmant. Les travailleurs palestiniens, qui dépendaient souvent de l’accès aux emplois en Israël, ont vu leurs salaires chuter drastiquement (près de 17 millions de dollars US de salaires perdus chaque mois) à cause de l’allongement des temps d’attente aux points de contrôle et des restrictions de circulation. Les entreprises palestiniennes, de leur côté, peinent à exporter leurs produits, ce qui les rend incapables de concurrencer les produits issus des colonies, qui bénéficient d’un accès privilégié aux marchés internationaux.

An iron gate near the Palestinian village of Al Buweib, in Hebron governorate. Photo by OCHA

Les États européens complices

L’Union européenne (UE) et ses États membres, ainsi que l’Angleterre sont les premiers partenaires commerciaux d’Israël. En important des biens produits dans les colonies et en permettant à des entreprises européennes d’y opérer, ils contribuent au financement, à la pérennisation et l’extension de l’occupation. Oxfam indique que l’UE importe 15 fois plus de produits issus des colonies israéliennes que des produits des agriculteurs palestiniens, une illustration de la manière dont les politiques actuelles favorisent l’économie des colonies.

Malgré les condamnations internationales, les États tiers n’ont pas mis en place de mesures efficaces pour interdire ce commerce. Les règles actuelles ne prévoient que des obligations d’étiquetage, qui sont détournées et insuffisantes pour arrêter ce commerce illégal.

Les principales entreprises complices

L’Oxfam dresse une liste de plusieurs entreprises internationales de premier plan qui sont directement ou indirectement impliquées dans le soutien de l’économie des colonies. Oxfam souligne que ces entreprises, en maintenant leurs activités, se rendent complices de violations des droits humains et ignorent leurs responsabilités juridiques et morales, comme le rappellent les Principes directeurs de l’ONU.

Cette implication prend plusieurs formes : des partenariats commerciaux, la fourniture de services, le financement de projets ou la vente de produits directement liés aux colonies. Le rapport d’Oxfam ne fait pas une liste exhaustive, mais mentionne des noms connus pour illustrer la gravité du problème.

Parmi les compagnies impliquées, le rapport cite :

  • La société française Carrefour : Le rapport accuse le groupe Carrefour (voir l’extrait détaillé) de s’être associé à une entreprise israélienne, Yenot Bitan, qui a des activités dans les colonies illégales. En permettant la vente de ses produits dans ces régions, Carrefour soutient et légitime directement l’économie des colonies.
  • Les entreprises de construction et de machinerie lourde : Des entreprises comme Alstom (France), Volvo (Suède), Siemens (Allemagne), JCB (Royaume-Uni), Caterpillar (États-Unis) sont pointées du doigt. Le rapport mentionne que les équipements de JCB, Caterpillar et Volvo sont utilisés pour la construction d’infrastructures de colonies et la démolition des maisons palestiniennes. De même, Alstom et Siemens sont accusés de fournir des systèmes de transport qui desservent les colonies, renforçant ainsi l’intégration de ces entités illégales dans le tissu économique et infrastructurel israélien.
  • Les entreprises financières et les banques : Le rapport insiste sur le rôle crucial du financement. Des banques comme les françaises AXA et le Crédit Agricole, la britannique Barclays sont accusées de fournir des services financiers et des prêts à des entreprises qui sont directement impliquées dans la construction et le financement de projets dans les colonies. Ce soutien financier est considéré comme un facteur clé de la perpétuation de l’occupation.
  • Les agences de voyage et les plateformes de réservation : Des compagnies comme l’allemande TUI et l’espagnole eDreams Odigeo sont également mentionnées pour leur rôle dans la normalisation des colonies par le tourisme. En proposant des hôtels et des visites dans les colonies, elles encouragent le tourisme dans ces zones, générant des revenus pour l’économie des colonies et minimisant la nature illégale de ces entités.
  • Les entreprises de logistique et de transport maritime : Des entreprises comme Maersk, qui fournissent des services de transport, sont également citées pour leur rôle dans la facilitation du commerce des produits issus des colonies vers les marchés européens.

Un appel à l’action pour sauver le peuple palestinien en respectant le droit International

Dans son rapport « Stop au commerce avec les colonies illégales », Oxfam fait des recommandations claires et concrètes. Le document exhorte les États et les institutions internationales à :

  • Adopter une législation contraignante : L’Oxfam appelle à l’interdiction totale de l’importation de produits issus des colonies illégales et à l’interdiction pour les entreprises de fournir des services ou d’investir dans ces territoires.
  • Faire pression sur les institutions financières : Le rapport demande aux banques et aux fonds d’investissement de cesser de financer les entreprises qui profitent de l’économie des colonies.
  • Rendre Israël responsable : Israël doit être tenu responsable de prouver que ses exportations ne proviennent pas des colonies, afin d’inverser la charge de la preuve et de garantir une traçabilité rigoureuse.
  • Informer les consommateurs : Oxfam alerte les consommateurs à être conscients de l’origine des produits qu’ils achètent et à soutenir les entreprises qui respectent les droits humains.

Extrait du rapport d’Oxfam sur l’entreprise française Carrefour

[Pétition] Carrefour, rompez vos liens avec la colonisation israélienne !

Carrefour est l’un des plus grands détaillants multinationaux dont le siège social se trouve en France. En 2022, il a conclu un accord de franchise avec Electra Consumer Products, une filiale d’Elco Ltd Holding176 et sa succursale Yenot Bitan qui autorise celle-ci à produire des biens Carrefour et à les vendre sous la marque Carrefour partout en Israël.

Au moins neuf magasins Yenot Bitan se trouvent dans en Cisjordanie et servent de super- marchés et de magasins de détail pour les colonies, notamment à Ariel et à Ma’aleh Adu- mim. Deux magasins Yenot Bitan situés en Cisjordanie (Neve Ya’akov à Jérusalem-Est et Modi’in Maccabim Re’ut) ont ensuite adopté intégralement la marque Carrefour. Ainsi, Carrefour est directement impliqué dans les colonies illégales en raison de ses propres intérêts commerciaux.

En 2023, Carrefour a signé des partenariats avec deux autres entreprises israéliennes, Juganu et Bank Hapoalim, qui soutiennent toutes deux l’économie des colonies. Juganu est une start-up technologique qui opère dans plusieurs colonies, et Bank Hapoalim est une institution financière israélienne majeure com- plice dans le financement de l’expansion des colonies.

Toujours en 2023, Carrefour a obtenu des prêts auprès de quatre grandes banques israéliennes (Hapoalim, Leumi, Mizrahi Tehafot et Israel Dis- count), toutes répertoriées dans la base de données du HCDH.182 Par exemple, Bank Hapoalim est une importante institution financière israélienne qui finance l’expansion des colonies et les projets d’infrastructure menés par les colons. Ses activités ont été directement liées au transfert forcé de communautés palestiniennes dans le TPO

Les partenariats commerciaux de Carrefour en Israël soutiennent directement l’économie des colonies en permettant la vente de ses produits dans les magasins situés dans les colonies. Selon les UNGP, lorsque ses relations commerciales peuvent porter atteinte aux droits humains, par exemple en soutenant l’installation de colonies illégales, Carrefour doit faire preuve d’une diligence raisonnable renforcée et user de son influence pour identifier, prévenir et atténuer ces atteintes, notamment en mettant fin à sa présence dans les colonies et en s’en désengageant.

Oxfam, 15 septembre 2025