Soudan. El Fasher, cœur brisé du Darfour : l’abandon d’une ville sous siège
Alors que le Soudan sombre dans une guerre totale, la ville d’El Fasher, dernier bastion du nord-Darfour, illustre l’impuissance internationale face à des crimes de guerre documentés.
Depuis la chute du régime d’Omar el-Béchir en 2019, le Soudan est plongé dans une tourmente politique : l’armée (Forces armées soudanaises, SAF) et les puissantes milices (Forces de soutien rapide, FSR) s’affrontent depuis le 15 avril 2023, plongeant le pays dans un chaos croissant.
Le Darfour, déjà théâtre d’exactions massives en 2003-2004, est redevenu l’épicentre du conflit. Le dernier rapport de l’ONU estime que près de 13 millions de personnes ont été déplacées depuis avril 2023, dont plus de 4 millions ont fui le pays. L’ONU décrit la situation comme « la pire crise humanitaire et de déplacement au monde »

El Fasher, capitale sous siège
Dans le nord-Darfour, la ville d’El Fasher, capitale régionale et dernier bastion gouvernemental, concentre aujourd’hui tous les drames. Pendant des mois, elle est restée encerclée, ses routes coupées, ses camps de déplacés sous assaut et l’aide humanitaire quasiment bloquée. Malgré les alertes répétées, « les efforts de prévention pour éviter une escalade militaire à El Fasher ont échoué », reconnaît l’ONU .
Des témoignages crédibles recueillis par Médecins sans frontières évoquent des exécutions sommaires, des bombardements d’hôpitaux et de maternités, des violences sexuelles utilisées comme armes de guerre et la destruction délibérée de villages http://MSF – Atrocités en cours à El Fasher, mai 2024. L’isolement prolongé de la ville a transformé ce refuge en piège mortel pour des dizaines de milliers de civils.
Crimes de guerre et impunité persistante
Selon la Mission internationale d’enquête des Nations unies, les deux belligérants ciblent délibérément des populations civiles, constituant ainsi des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité http://OHCHR – Rapport de la Mission d’enquête, juin 2025. Les mandats de la Cour pénale internationale (CPI), émis dès 2009 et 2010 contre Omar el-Béchir et plusieurs de ses proches pour génocide et crimes contre l’humanité, n’ont jamais été exécutés http://CPI – Situation au Darfour (Soudan. L’impunité demeure totale.
Le silence ne peut plus être une option
Ce manque de réponse effective renforce l’impression d’un abandon organisé : la communauté internationale, consciente des risques, n’a pas su – ou voulu – agir à temps pour empêcher le basculement dans le chaos.
Il est urgent d’imposer des mesures de protection concrètes : arrêt des livraisons d’armes, ouverture de couloirs humanitaires et enquête indépendante sur les exactions.
Car au-delà des chiffres se trouvent des vies humaines, des centaines de milliers d’êtres pris au piège d’une guerre délétère, dans l’indifférence du monde.
